Conquête de la Marche - l'opération « Souffle de l'Ouest Civilisateur »

Cela faisait plusieurs semaines que l'opération « Souffle de l'Ouest civilisateur » était en gestation, sans avoir pour autant été préparée lors de la dernière séance du Conseil de Guerre, laquelle s'était intéressée à une toute autre chose... En application du traité entre l'Empire de Belondor et la Semi-République du Crasselande, les forces armées belondaures avaient fait évacué toute la zone aux alentours de Crassenheim, de façon à ce qu'elle soit rétrocédée aux Crasselandais. Mais, le Belondor était donc désormais autorisé à mettre sur pied une opération de sécurisation et de pacification de la Marche, les terres situées en anarchie depuis plus de dix ans désormais entre le Belondor et le Crasselande, et qui avaient même contaminé les derniers, avant que Egon Schweinwald ne sorte l'Etat oriental de ses cendres. Et désormais, depuis un an, c'était la préfecture de Veledris qui subissait les conséquences en terme de sécurité et de brigandage des bandes armées venant de la Marche, à tel point que les routes proches de la frontières devenaient dangereuses comme elles ne l'avaient plus été depuis la Révolution impériale.

Le 1^er Nabelnine 2715, la X^e légion sous les ordres du général Hector de Chasselac, de garnison à Panez, reçut l'ordre télégraphié de la part du commandant de la III^e Armée, le général Lucius Solmenière, de se lancer à l'assaut de la Marche. Objectif, l'éradication de toutes les bandes armées et autres brigands foisonnant sur les routes impériales, puis après avoir traversé la frontière, la pacification de toutes les villes, la restauration de l'ordre et l'organisation d'un nouveau pouvoir bénéficiant d'une autorité légitime et légale. À dix heures du matin, la X^e légion leva le camp. L'opération « Souffle de l'Ouest Civilisateur » venait de débuter.

Voilà plusieurs semaines que les soldats de la X^e légion sous les ordres du général Hector de Chasselac avaient chassé toute activité des bandes de brigands venues de la Marche et qui sévissaient en Belondor. Mais il fallait désormais rétablir l'ordre, pacifier les routes, les villes, assurer la sécurité des habitants au sein même de la Marche conformément au plan établi de l'opération « Souffle de l'Ouest civilisateur ». Or, quelques Marchoins – ainsi qu'on appelait les habitants de la Marche en Belondor – semblaient refuser cette intervention des armées de l'Empire, laquelle était censée pourtant mettre fin à l'anarchie régnant depuis plus de cinq ans dans ce pays, et organisaient certains réseaux de résistance.

La capitale de la Marche, Meldoras, une cité d'un peu moins de 100 000 habitants, était ainsi devenu le lieu de combats sporadiques dans ses faubourgs entre ces bandes de brigands, qui se piquaient de devenir résistants après avoir été les oppresseurs du peuple, et les forces armées impériales. Ces bandes de brigands étaient le plus souvent constituées d'individus au patronyme russlave. En effet, la population de la Marche, originellement très proche au niveau de la culture, de la langue et des populations du Belondor, avait bien changé depuis quelques décennies sous l'effet d'une très forte immigration venue de Russlavie quand la Marche était riche et prospère. Or, si des Marchoins avaient immigré en Belondor avec l'anarchie régnant depuis quelques années, tel n'était pas le cas des Marchoins d'ascendance russlave, leur pays d'origine n'étant pas plus stable politiquement. De fait, c'est près de 40% de la population marchoinne qui était russlave, désormais. Et cette population était bien décidée à poursuivre ses affaires (criminelles), que le Belondor gênait par son intervention armée.

Nonobstant, les troupes du général de Chasselac progressaient. Un des plus célèbres brigands de la Marche, Anton Abramovic, lequel avait tenté de restaurer un État à dominante russlave – la Staratélie – à la place de la Marche, avait fui au sud, trouvant refuge au sein de la République orionaise du Doratos. Il avait même réussi à corrompre les autorités de celle-ci, à tel point qu'elles avaient officiellement pris position contre l'intervention belondaure, contrairement au reste des États qui l'approuvaient ou n'en avaient cure. La plupart des bandes de brigands avaient été appréhendées ou leurs membres tués. Nombre d'entre eux étaient d'ores et déjà jugés par des tribunaux militaires. Les sous-fifres, en échange d'une amnistie, étaient incités à dénoncer leur chef. L'ordre, petit à petit se rétablissait et la rumeur d'une annexion de la Marche en tant que sous-préfecture à part entière enflait...

- Alors, colonel, quels résultats, aujourd’hui, demanda le général Hector de Chasselac.
- C'est une bonne journée, mon général, répondit le colonel Néron Kuvilier. Nous avons arrêté pas moins de 77 brigands. Ceux-ci passeront devant la cour martiale demain, ou après-demain si l'on ne peut faire avant.
- Bien, bien... à combien en sommes-nous depuis le début ?
- Nous avons arrêté 1 003 personnes, mon général. Parmi celles-ci, seul un quart avait des responsabilités véritables au sein de ces bandes de brigands. C'est pourquoi il n'y a eu que 279 condamnations à mort, dont 250 ont été exécutées, conformément à vos instructions de ne condamner qu'à la prison les petites mains, et à amnistier ceux qui vendraient certains de leurs camarades. Vraisemblablement, il y a nombre de brigands qui se cachent encore, sans compter les partisans qui continuent de lutter contre nous et que nos services de renseignement estiment à 5 ou 6 000 hommes. Pire, il est à craindre que la population cache les principaux chefs des bandes de brigands et autres organisations criminelles, mon général. Soit par duplicité, soit par peur de représailles.
- Alors, comme ça, les Marchoins trouvaient que 100 sesterces pour chaque membres d'une bande vaut mieux que 500 pour leurs chefs ? Eh bien ! Passons à l'offensive. Faîtes placarder partout que c'est 1 000 sesterces que nous donnons pour les « hauts gradés » de ces brigands et 2 000 pour les « chefs suprêmes ». Enfin, j'en donne 5 000 pour qui me livrera les six brigands les plus puissants du pays.
- Bien mon général !

Pendant que le colonel sortait, le général de la X^e légion ouvrit la fenêtre de ce qui était autrefois le palais présidentiel de la Marche, jetant un regard quelque peu dégoûté sur Meldoras, ville en ruine crasseuse et malodorante.

» Le vent de la victoire souffle sur l'Union des modérés