Jeux Microlympiques d'Hiver de Ségelélao (Bangana)

Plusieurs centaines de techniciens banganais s'affairent autour de la place du village microlympique, sur laquelle ont été installés une scène magistrale et des gradins en bambou dont la solidité à toute épreuve est en train d'être testée par Robert, l'éléphant officiel de Ségelélao.

Des lutteurs de kowako s'entraînent sur un ring provisoire en attendant les spectateurs... on murmure qu'il y aura quelques parieurs à la sauvette et que des "facilitateurs" se faufilent déjà parmi la foule déjà compacte pour faire connaître les cotes.

Plus loin, dans le quartier aux lampions, la police pourchasse les dernières "filles olympiques" qui prévoyaient de monnayer assez cher leurs massages et autres services aux athlètes... plusieurs se sont réfugiées en contrebas, dans la décharge, mais il n'est pas impossible qu'elles reviennent une fois la nuit tombée.

Pour tester la sono, le vieux chanteur à succès Eddie Krouné fait des vocalises, accompagné de ses tams-tams habituels...


La nuit avait été courte et agitée : le stock de fusées de la 89ème Brigade Pyrotechnique de l'Armée de Libération du Sud-Bamba (qui ne servait plus) était parti littéralement en fumée.

Les athlètes se réveillaient avec la gueule d'ébène, sauf les vrais, qui étaient déjà à l'entraînement et à proximité des départs.

Le Belondaure Phillin Alcèdre appréhendait tout particulièrement cette course. Malgré son professionnalisme, il n'en demeurait pas moins que participer à un tel événement était une première, et que l'anxiété était à son paroxysme. Il ne doutait pas de lui, mais deux de ses dahus semblaient particulièrement excités voire hyperactifs. Dès lors, difficile d'imaginer le déroulement de la course.
Pour autant, il n'avait pas prévu de changer d'équipage et comptait sur les deux autres montures pour organiser la course de l'attelage. Eh puis, selon sa position, les dahus finiraient bien par se rentrer dedans et certains passeraient sûrement à la trappe, il fallait donc savoir raison garder.

Sur la ligne de départ, les différents concurrents semblaient sûrs d'eux. Le Krasslandais notamment. Après tout, ce sport venait de chez eux. Phillin n'avait plus qu'à lui montrer que de l'autre côté de la frontière, les Belondaures n'étaient pas en reste non plus.


Les chronomètres banganais ont la particularité, comme les étrangers l'ont remarqué, de diviser chaque heure en 100 minutes. Ce serait assez pratique si tous les chronomètres étaient réglés à la même cadence. Hélas, c'est loin d'être le cas. Mais pour Ségelélao, on a pris soin de faire appel au même fabricant.

A mi-chemin de la première étape, les commentateurs commençaient à bâtir des pronostics : le Krasslandais Giftig, en bon éleveur de dahus, était parti à toute vitesse. On lui prédisait une arrivée en moins de 3 heures. Phillin Alcèdre et ses dahus, eux, frôlaient les 13 heures selon les parieurs. Quant à Isidore Fouétar et son attelage de dahus mal acclimatés, c'était catastrophique : pas loin de 84 heures lui seraient nécessaires pour boucler l'étape.
Mais peut-être était-ce une habile stratégie. En tout cas, cela serait peut-être une bénédiction pour la suite : en effet, la distance entre le Banganais et les "Nordiques" était déjà conséquente...

Le marathon touche à sa fin.

Depuis trois jours, les 3 attelages se livrent une lutte sans merci autour du domaine quasiskiable du Ségelélao pour finir le plus loin possible de leurs concurrents.
Les Banganais, à la traîne, allaient probablement jouer la sécurité en plaçant peu de dahus en tête du traîneau.
Les Krasslandais se disaient que leur seule façon de gagner était d'augmenter l'allure pour creuser l'écart en tête de course.

Logiquement, les Belondaures étaient ceux qui allaient faire pencher la balance d'un côté ou de l'autre.

Mais, comme dans toute guerre psychologique, tout pouvait être inversé : les Krasslandais pouvaient craindre les Belondaures et jeter deux ou trois dahus par-dessus le ravin pour éviter un combat par bestiaux interposés qui rappellerait les tensions diplomatiques du continent nord.
A l'inverse, les Banganais pouvaient prendre le contre-pied et aller chercher de l'espace en tête de course.

Phillin Alcèdre, conscient d'être le faiseur de rois si les deux autres jouaient la sécurité, poursuivit sa cadence à un bon rythme en utilisant 6 dahus.
Quand à Giftig, pourvu de 8 dahus flambants neufs, il prit lui aussi un excellent départ.

Au tiers de la seconde étape, les dahus belondaures reniflèrent les dahus krasslandais qui avaient laissé nombre de traces de leur passage dans la neige boueuse. Accélérant la cadence, leurs effluves portées par le vent finirent par titiller l'odorat des dahus krasslandais. Devenus fous, ceux-ci les attendirent au kilomètre 421 et les attaquèrent sauvagement. Ni Giftig ni Alcèdre ne purent réfréner leurs bêtes. Huaahuadaar, chef de rang, se distingua par plusieurs K.O. assénés aux belondaures.

A son rythme, le koussi Fouétar, malgré ses 4 dahus pelés empruntés au zoo de Bombasha, dépassa sans encombre les deux attelages immobilisés par le combat.

Il franchit la ligne d'arrivée sans encombre, 334 heures après le départ. (bon, les chronomètres utilisés étaient de la marque Tébouré qui divisent une journée en 149,45 heures)

Giftig, vainqueur de la première étape, remporte la médaille d'argent, laissant celle de savonite à Alcèdre.

Épreuve de descente.

Adémar Calpunien, neveu de l'Archichancelier de l'Empire, était le premier coureur de Belondor à s'élancer. Ses entraînements des jours précédents avaient été peu concluants... et c'était d'ailleurs un euphémisme que de dire ça. Sa fierté en avait pris un coup et il s'il rêvait encore de victoire et de gloire, il ne l'affichait plus ostensiblement.

Perché sur ses skis, ses bâtons fermement maintenus en main, il s'élança avec toute la rage de vaincre que pouvait avoir le Belondaure dans les tripes.


Sous la pression de l'enjeu et d'un mouvement trop brusque du bassin, le jeune coureur fit chasser ses skis et tomba dans la poudreuse peu avant la fin de l'entame. Dans sa chute, il percuta une première fois le cordon de sécurité avant qu'il ne reste bloqué, la jambe toute retournée, dans le filet.

C'en était fini pour lui.

La grimace de Lucius Ontinès, qui devait s'élancer à son tour, déformait son visage. Depuis le portillon de départ il avait assisté à la tragique descente de son compatriote et regardait, atterré, les secours l'évacuer de la piste. Soudainement moins psychorigide dans sa combinaison, il s'élança à son tour lorsque l'arbitre lui en intima l'ordre.

Il avait décidé de mettre le paquet à son tour, au risque de finir comme le jeune Calpunien.


Arrivé à l'entame avec une vitesse de 12 km/h, il abordait désormais la phase la plus rapide de la descente, jusqu'à l'arrivée. Se bloquant sur ses skis, il prit le plus de vitesse possible, espérant ne pas sortir de la piste à son tour.


Trop rapide avec ses 252 km/h, la chute fut lourde là aussi pour Lucius Ontinès. Comme pour la délégation du Wasteland, il semblait peu probable de voir un Belondaure sur le podium.

Enfin, dernier à partir, Nathaniel Piconian partit à l'abordage. Pour lui, il n'était pas question de prendre de risque outre-mesure mais de bel et bien assurer la descente... jusqu'au bout !


Sa vitesse était modérée. Avec 8 km/h, il ne ferait pas peu à grand monde. Il prit donc un peu plus de vitesse... et de risque.


Les bras levés vers le ciel, Nathaniel Piconian venait de faire un score incroyable : 192 km/h. Il était pour l'heure à la première place. Il restait encore 4 descendeurs mais il espérait pouvoir finir sur le podium.

Après quelques minutes d'euphorie devant ce résultat qui contrastait avec les déboires de ses compatriotes, il alla s'assurer qu'ils allaient bien.

Slalom Géant.

Le nombre de prétendant au titre est déjà gigantesque, et ce alors que d'autres concurrents sont encore attendus par l'express de brousse qui relie Largeville à Troupomé.

Pas moins de 10 slalomeurs sont montés au Sommet du Ségelélao et, alors que l'implacable soleil du continent sud, en s'élevant vers le zénith, transforme la neige glacée en soupe innommable (on parle déjà du slalom le plus difficile de l'histoire des Jeux Microlympiques), les premiers départs ont lieu. Les Belondaures et les Wastelanders sont favoris, avec chacun 3 candidats. Le Bangana a la particularité de faire concourir deux hommes politiques fameux, le Sénateur Dudu qui fut au pouvoir pendant de nombreuses années, et Houssé Saladié qui exerça la présidence intérimaire plusieurs fois dernièrement. Mais la surprise pourrait venir du Krassland, Mlle Irrweg étant la plus entraînée de tous.

Ca y est ! le ruban vert et rouge est tranché à la machette. C'est parti !

Elyade Daubencel était le premier Belondaure à s'élancer sur la piste du slalom géant. Le Banganais B. Houssé Saladié avait ouvert les hostilités, suivi par l'Edoranais Eugène Césarée. Si le premier avait brillamment réussi, le second avait visiblement eu plus de difficultés.
Concentré, le skieur Belondaure l'était. Il avait eu le temps de repérer la piste et de s'adonner à un premier entraînement sur la poudreuse ; pour autant, il était désormais en pleine compétition avec à la clef, le prestige de la Nation.

Il s'élança dès qu'on lui en intima l'ordre, prêt à défier les 78 km/h du Banganais.


La neige était toujours aussi collante : 15 kilomètres à l'heure comparés aux modestes 45 de son prédécesseur, cela n'était pas très encourageant. Dès lors, il n'avait plus le choix que de faire pivoter son bassin le plus bas possible pour gagner la plus grande vitesse... Il n'avait plus rien à perdre.


Terrible désillusion pour le Daubencel qui ne sera pas sur le podium. S'il a fait un excellent parcourir, la descente de la dernière ligne droite s'est montrée bien plus difficile, l'un de ses skis refusant de se détacher de la neige gluante du bas de la piste. Ses 21 km/h étaient un piètre résultat.

Augustus Hiagens n'en croyait pas ses yeux. Lui qui devait s'élancer après le Sénateur Dudu venait de voir que ce quinquagénaire surclassait tout son monde. Sa technique était primaire mais payante... pourtant, l'équipement des banganais et des belondaures était aussi archaïque. Peut-être fallait-il donc que les coureurs de l'Empire ne fassent preuve d'un peu moins de sérieux et plus de grâce.


Au vu du nombre de coureurs qui devaient encore descendre, il n'était pas certain que 70 km/h suffisent. L'assurance que le skieur belondaure avait acquise dans l'entame ne devait pas le lâcher pour le final. Pourtant, il paru hésiter et se ravisa peu avant l'arrivée, préférant assurer ses arrières... après tout, on ne savait pas ce qui pouvait arriver.


Ne pouvant faire mieux, le militaire belondaure dû se satisfaire de ce score, passablement moyen eu égard à la chance (ou à la fraude) banganaise. Ces petits hommes ne valaient rien qui vaille, surtout quand on voyait comment ils entretenaient leur matériel et leur personnel.

Enfin, le dernier coureur de la compétition était le Belondaure Liviel Cassanien. Après les performances des athlètes du Wasteland, il n'y avait plus guère de pincettes à prendre. L'officier chaussa ses skis peu avant le portillon de départ et attendit les signaux visuel et sonore pour s'élancer dans la course de sa vie. Plus rien ne lui faisait peur désormais.


Erreur de chronomètre ou véritable arrêt à la fin de l'entame, il était difficile de le savoir. Pour autant, le coureur poursuivait sa descente.


Liviel Cassanien avait tristement échoué au pied du podium. Sa quatrième place ne le satisfaisait guère. Tout comme Daubencel et Hiagens, il ne resta pas pour la remise des décorations. Le Belondor n'avait pas brillé, il avait même raté son entrée en lice.

Et tout d'abord, le troisième, médaillé de savonite, j'ai l'honneur de présenter... Miiiiike... CURVING !
L'hymne du Wasteland, un morceau de county music, est interprété par le choeur des tam-tams de Troupomé.

Puis vient le tour de la médaille d'argent... un homme s'avance, habillé en cow boy... Jimmyyyyyy..... SUCHACURL !!!
Une deuxième fois, l'hymne wastelander résonne dans l'arène. L'interprétation est discutable mais la délégation officielle de ce pays du continent sud ne s'en offusque pas, apparemment.

Puis un tank surgit... un homme en sort rapidement... à peine visible sous un épais gilet pare-balles, il salue rapidement la foule, prend sa médaille d'or et repart sous les sifflets... le Sénateur Dudu ! Malmené par les troupes de N'Bissi à Bombasha où il repart séance tenante pour protéger le Palais d'Ivoire, le Sénateur n'a pas la tête aux festivités ! Pourtant, c'est bien lui le recordman actuel du slalom géant !
C'est dans une atmosphère lugubre que retentit le formidable hymne banganais...
Sénateeeeeuurr.... DUDU !!!

Épreuve de patinage artistique.

C'était au tour du seul patineur masculin de la compétition de s'élancer. L'officier supérieur d'artillerie, chapeau sur la tête et médailles sur la poitrine, avança sur la piste tout de noir vêtu. Sa concentration était telle qu'il n'entendit pas les quolibets qui venaient des tribunes.


Avec ce premier tour pour rien, il décida de tenter de nouveau une figure.


Au sortir de son premier double axel, Octavius de Rieulong jeta son chapeau en l'air avant de se jeter à sa poursuite, effectuant par la même un second double axel.


Avec encore deux doubles axels, le Belondaure faisait le minimum mais s'assurait au moins une médaille, pour l'heure derrière l'athlète Krasslandaise.

Il sortit de la piste sans prendre attention au ressenti des spectateurs. Son attention était seule réservée aux arbitres qui devaient lui attribuer les points de sa prestation.