La Guerre de Sorabe : Le Zollernberg, Sorabe et le Belondor.

La Guerre de Sorabe : Le Zollernberg, Sorabe et le Belondor.

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Le Patriote a décidé de revenir, au lendemain du Conseil de Guerre qui s'est tenu Salon Antonine I^er entre Sa Majesté l'Empereur et ses plus proches conseillers politiques et militaires. Afin de pouvoir comprendre toute la complexité géopolitique, militaire et juridique du sujet, M. Guilhem d'Hartigues, sénateur élu de la Préfecture d'Ecosient et membre de l'Union des modérés nous a apporté son concours, ayant assisté la Connétablie de l'Empire dans ses communiqués officiels des derniers jours.

À titre de prolégomènes, un rappel des faits semble nécessaire pour pouvoir cadrer les tenants et les aboutissants de la situation.

1. Bref historique de l’histoire de l’Île de Sorabe

L’Île de Sorabe est découverte en 1853 par des repris de justice belondaures ayant décidé de s'affranchir de la justice royale et de trouver refuge dans l'ancien archipel nautien. L'administration et l'armée royales n'ont pas donné suite, comme il advenait bien souvent dans pareil cas de figure à l'époque où l'état de droit n'était pas une valeur cardinale du fonctionnement du Belondor. Las de voir le coût des assurances maritimes augmenter en raison des actes de piraterie qui gangrènent la mer Océance, les armateurs et marchands belondaures demandent au Roi Hactorel VI le Bel d’intervenir. La Marine royale intervient en 2312, une flotte conséquente étant envoyée à destination de l’île de Sorabe pour écraser les pirates qui lancent leurs attaques depuis Lusance.
Afin de prévenir toute exaction nouvelle, Hactorel VI décide d’annexer l’île et y fonde la ville de Varennes, en hommage à la Comtesse Clothilde Varennes de Burdigeaux. Il y établit la civilisation, l’état de droit et favorise la conversion au syisme. À partir de cet instant, l’île de Sorabe entre officiellement dans la composition territoriale du royaume, comme en attestent plusieurs atlas du milieu du XXIVe siècle dont nous avons pu nous procurer des planches. Par ailleurs, Hactorel-Constantine de Porhoët*, jurisconsulte et magistrat du parlement de Rex Civit d’alors, consacre notamment un tome de son Manuel pratique à l’attention des dépositaires de la justice en vue de l’application de la règle bonne et juste en toute circonstance et en tout point du monde syiste, à l’application du droit sur l’île de Sorabe, parlant notamment du Provinciat de Varennes, correspondant à l’équivalent d’un parlement.
En raison de la Grande Révolution qui secoue le royaume et qui laisse place à l’Empire en 2575, les forces royales stationnées en Sorabe sont rappelées sur le Continent pour permettre au Roi Grenel III de conserver son trône. Une fois Antonine Ier proclamé Empereur de Belondor, il est possible de considérer que l’Empire se désintéresse de la Sorabe en dépit des nombreuses batailles terrestres et maritimes qui ont lieu. Préférant asseoir sa domination sur la métropole, le jeune Empereur envoie des renforts en sous-nombre et peu à peu, la population se désintéresse de l’Empire pour réclamer l’indépendance de l’île. Toutefois, tout au long du Premier Empire, il est toujours possible de considérer la présence belondaure sur le sol sorabe comme étant effective puisque ce n’est qu’en 2678 que le premier Prince-Amiral se déclare comme tel et décrète la Principauté de Sorabe.
Encore aujourd’hui, l’Empire de Belondor se refuse à connaître l’État de Sorabe et considère le territoire comme étant en insurrection. Dès lors, en théorie, il reste responsable de tout acte commis par un sorabe envers un sorabe ou un ressortissant étranger puisqu’il lui incombe d’exercer son pouvoir de police administrative et judiciaire.

2. L’affaire de l’Inzubmerzible

Le 23 Antonine, un communiqué émanant du soi-disant Prince Frédéric I^er de Sorabe informe l’Archipel du torpillage du navire de la Golden Ztar Line, l'Inzubmerzible, par un navire sous pavillon sorabe, de la mort de cent dix-sept citoyens zollernois et de la capture de passagers.
Le ministère des Affaires étrangères du Grand-Duché de Zollernberg répond le lendemain par un communiqué et déclare notamment que : « Le Zollernberg n'a jamais reconnu la Principauté de Sorabe. Celui qui se fait appeler Prince-Amiral n'est qu'un chef de gangs, qui, à la faveur de circonstances particulières a pu donner à son repère l'apparence d'un État.
Ces meurtres gratuits prouvent bien que nous n'avons point affaire un État de droit, mais bien à une bande de criminels. Aussi, il ne serait question de déclarer une guerre mais de mener une opération de police de grande envergure ».
Par conséquent, le Grand-Duché de Zollernberg fait savoir ses réactions et la politique qu’il entend mener en conséquence qui, bien loin d’être une guerre d’État à État n’est ni plus ni moins qu’une ingérence territoriale manifeste au sein de l’Empire de Belondor. C’est d’ailleurs ce qui se réalise dans les faits lorsque l’Empire d’Édoran et le Grand-Duché de Zollernberg ont déployé leurs forces face à Port-Princier, sans avoir sollicité l’aide du Belondor.

4. Le Traité de fondation de la Triple-Alliance, caillou diplomatique dans le soulier zollernois

Le Conseil de Guerre du 1er Constantine 2715 l’a rappelé avec force et de façon unanime, le Traité de fondation de la Triple-Alliance fraichement signé et ratifié par les États co-signatires stipule en son article II la chose suivante : « Les parties contractantes se reconnaissent mutuellement une zone d'influence respective intégrant leurs territoires métropolitains, leurs dépendances, le territoire de leurs vassaux, leurs eaux territoriales et leurs espaces aériens » (al. 1er). « Chacune des parties contractantes s'engagent à ne pas pénétrer les zones d'influence des autres parties, et à ne pas agir de manière menaçante envers elles. Elles s'engagent également à ne pas entrer en conflit armé les unes contre les autres pour quelques raisons que ce soit, ni par l'intermédiaire de leurs alliés respectifs » (al. 2). « Les parties contractantes reconnaissent la nécessité de promouvoir la paix dans le micromonde et plus spécifiquement le Continent Nord » (al. 3).
Autrement dit, le territoire national d’un État co-signataire ne peut faire l’objet d’une intervention militaire d’un membre de la Triple-Alliance. Compte-tenu du fait que l’Empire de Belondor considère toujours l’île de Sorabe comme étant une dépendance insulaire à son territoire et argumenté par le fait de sa proximité géographique, culturelle, religieuse et linguistique, l'Empire considère la Sorabe comme étant partie de sa zone d'influence. Dès lors, nul État n'est autorisé à y pénétrer sans son consentement. Par ailleurs, seul l'Empire de Belondor est habilité à intervenir pour y rétablir l'ordre.
Cette situation engendre plusieurs conséquences : la première est que le Grand-Duché de Zollernberg aurait dû passer par la voie diplomatique pour faire respecter les stipulations du Traité et a agi en violation de l’accord qui existe entre les Empires de Belondor et d’Édoran et lui. En deuxième lieu, l’Empire de Belondor aurait dû intervenir en exécution d’une mesure de police sur son territoire pour arrêter les coupables et les juger suivant le droit applicable en Belondor. En troisième lieu et consécutivement au deuxième point, le Belondor n’ayant pas reconnu la Principauté de Sorabe comme État et n’ayant pas agi pour endiguer la piraterie devrait théoriquement être amené à réparer le dommage survenu du fait des actes incriminés qui s’élève à plusieurs dizaines de milliers de sesterces.
De facto, le Grand-Duché de Zollernberg, ayant agi dans la précipitation a omis de respecter le Traité qui le lie notamment à l’Empire de Belondor entraînant un casus belli regrettable et malheureux.

4. En serait-il de même en cas d’absence de Traité de fondation de la Triple-Alliance ?

La réponse est simple et ambivalente : oui et non. Si le Traité de fondation de la Triple-Alliance n’avait pu jouer pour une raison ou pour une autre, il s’aurait agi d’un acte de guerre commis à l’adresse de l’Empire de Belondor, sans déclaration préalable. En effet, Elbêröhnit considère l’île de Sorabe comme une zone exclusive sinon une zone conflictuelle interne à l’Empire et qu’en cette espèce, toute intervention militaire étrangère doit légitimement considérée comme une ingérence territoriale. De fait, la situation en serait arrivée aux mêmes conclusions sans pour autant dépendre des mêmes causes.

5. Et ensuite ?

Maintenant que le Grand-Duché de Zollernberg s’est rendu-compte de sa terrible méprise et a retiré ses forces armées de la Sorabe en mouillant dans ses eaux territoriales, nous avons bon espoir de penser que la rencontre demandée par l’Empire de Belondor à Zozolulu en présence des différents souverains signataires du Traité de fondation de la Triple-Alliance permettra d’aboutir à un résultat diplomatique satisfaisant.
Pour autant, cela ne règlera pas la question de la flotte sorabe. Il pourrait dès lors être entendu qu’une destruction conjointe des navires et des infrastructures militaires de la Sorabe soit envisagée, voire à ce que l’île revienne officiellement dans le giron belondaure avec l’envoi de contingents militaires conséquents pour y rétablir l’ordre. Néanmoins, cela ne dispenserait en rien l’Empire de Belondor de son obligation de réparer le préjudice subi par le Zollernberg suite à la destruction de l’Inzubmerzible.

6. Le rôle de la Très Sainte Église Syiste Occidentale

Malgré l’envoi de l’Ordre de Sainte-Éléa-la-Ressuscitée qui demeure un ordre militaire, il ne semble pas qu’une attaque émanant du Saint-Siège soit actée. Le rôle de la Très Sainte Église Syiste Occidentale est avant tout d’ordre humanitaire et religieux, la présence d’un prédicateur de la foy sur place présage d’ailleurs d’une possible reprise en main du territoire sorabe qui a connu plusieurs décennies de dépravation.
Assurément, faire rentrer la foy syiste dans les cœurs sorabes leur permettra de contrebalancer leur penchant pour la rapine et la piraterie.

En conclusion, nous espérons qu’une solution profitable à l’Empire de Belondor ainsi qu’au Grand-Duché de Zollernberg soit trouvé dans les plus brefs délais. Malgré tout, ce conflit malheureux aura permis de mettre l’accent sur une situation ubuesque en mer Océane et peut-être, de permettre à l’Empire de retrouver son unité d’antan.



* Aïeul direct de Monsieur Henri-Maxime de Porhoët, Gouverneur de la Banque impérial.